Arsène Lupin et “Le Bouchon de cristal” est une aventure du célèbre gentleman-cambrioleur par Maurice Leblanc, publiée au cours de l’année 1912. Il raconte l’histoire d’un cambriolage qui, ayant tourné au meurtre, contraint Lupin a affronter le redoutable député Daubrecq pour sauver ses complices. Malheureusement pour Lupin, Daubrecq n’est pas seulement richissime et puissant, il se montre également sans scrupule et vindicatif. Lupin va devoir découvrir non seulement pourquoi son cambriolage s’est converti en assassinat, mais aussi la raison pour laquelle ses complices, son ennemi et d’autres mystérieux intriguants se disputent avec acharnement un simple bouchon de cristal.
Mystère et cliffhanger
Le format feuilletonesque de ce roman a certainement contribué à en faire un des livres les plus emplis de suspens qu’il m’ait été donné de lire. Non seulement l’enquête progresse lentement, mais elle est riche en rebondissements et en mystères. Sa force réside cependant dans les multiples échecs du protagoniste, qui s’efforce avec verve, ruse et bravoure de sauver ses complices de l’échafaud, mais est contrecarré dans ses plans par de nombreux adversaires.
Daubrecq est par ailleurs un ennemi haïssable, aussi puissant physiquement et politiquement qu’abusif envers tous les autres personnages. Cela devient si frustrant, à force, que j’ai fini par croire que Lupin, à l’instar de Sherlock Holmes dans Un Scandale en Bohème, allait échouer.
Lupin est d’autant plus touchant que sa détresse rejoint celle de la lectrice. Loin du héros de conte, son culot, son humour et son optimisme bravache ne lui épargnent pas des moments de grande vulnérabilité physique, ni de désespoir. Comment vaincre un député tout puissant ? Malin, riche courageux, Lupin reste un simple cambrioleur…
À voleur, voleur et demi
Le registre familier qu’emploi Arsène Lupin lorsqu’il se dévoile le campe décidément en tant que criminel de basse extraction, combattant des criminels de la haute société, avec plus de compassion et de droiture qu’eux-mêmes n’en démontrent. Je trouve que cela donne d’autant plus de poids au propos, au fait que ce “gentleman” soit en effet plus “gentil homme” que les puissants qui dévalisent les plus modestes en plein jour.
Généreux, il n’hésite pas à dépenser, sans compter, les richesses qu’il a accumulées pour venir en aide à ceux qui le sollicitent. Il s’efforce de tenir ses promesses, contrairement à un adversaire de bonne réputation, qui se montre menteur et hypocrite.
Mention spéciale au fait que, bien que son coeur ai été dérobé à son insu par une dame de l’histoire, il accepte sans amertume ce cambriolage et les raisons qui poussent la belle à refuser ses avances. Là encore, sa galanterie est présentée comme l’idéal du gentleman, par opposition à Daubrecq, qui prétend aimer mais souhaite uniquement dominer et posséder.
Plus noble que les gentilshommes
Au final, Le Bouchon de Cristal représente le combat d’un simple voleur des rues contre des voleurs de pouvoir, les politiciens sans scrupules qui abusent de leurs prérogatives pour obtenir ce qu’ils souhaitent -biens ou personnes. Aventure intemporelle, ou plutôt, terriblement contemporaine, via Arsène Lupin et “Le Bouchon de cristal”, Maurice Leblanc rappelle que, face à un gouvernement corrompu, il n’est pas immoral d’user de moyens illégaux pour rétablir la justice.